Mutations - Les Chimères de Clément Janequin

Clément Janequin (1485-1528) : La chasse: Gentilz veneurs, La guerre: Escoutez tous gentilz Gallois, Le Blason du Beau Tétin, - Mike Svoboda (*1960) & Clément Janequin : Voulez ouyr les Cris de Paris - Clemens Non Papa (ca.1510-1555) : Le Blason du Laid Tétin - Jannik Giger (*1985) : On one or with you - Betsy Jolas (*1926) : LASSUS-FANTAISIE: Ô doux parler - Roland de Lassus (1532-1594) : Je l‘ayme bien - Jean-Christophe Groffe (*1978) & Roland de Lassus : La nuict froide et sombre - Groffe / Giger : Mutation I-IX

Ensemble Thélème : Julien Freymuth, altus / Lior Leibovici, ténor / Ivo Haun, ténor / Jean-Christophe Groffe, basse et direction / Ziv Braha, luth - Ensemble XASAX : Marcus Weiss, saxophone soprano et alto / Pierre-Stéphane Meugé, saxophone alto / Jean-Michel Goury, saxophone ténor / Serge Bertocchi, saxophone baryton

« mutations - les chimères de Clément Janequin » est le troisième volume d'une trilogie que l'ensemble thélème consacre à ce compositeur majeur de la Renaissance. Ce sont quatre années de travail passionné dont voici aujourd'hui l'aboutissement.
Mêlant la musique de Clément Janequin ou Roland de Lassus à de nouvelles oeuvres de Betsy Jolas, Mike Svoboda, Jannik Giger et Jean-Christophe Groffe, « mutations - les chimères de Clément Janequin » est conçu comme un objet sonore complet dont la dramaturgie invite l'auditeur à un voyage aux paysages surprenants.
« mutations » est un lien entre la musique de la renaissance  et la musique contemporaine. Cet enregistrement réunit l'ensemble thélème, spécialisé dans l'interprétation de la musique ancienne et le quatuor de saxophones XASAX, spécialisé dans l'interprétation de la musique contemporaine.
Les deux ensembles ont proposé à la compositrice Betsy Jolas et au compositeur Mike Svoboda de « recycler » des oeuvres de la renaissance française pour composer chacun une nouvelle oeuvre. Ainsi, pour la pièce maîtresse du programme, Betsy Jolas a soumis de manière magistrale une chanson de Roland de Lassus à une relecture pour les huit musiciens (LASSUS-FANTAISIE). Le compositeur germano-américain Mike Svoboda exploite la présence des quatre saxophones pour renforcer l'énergie débordante de la chanson de Janequin « Les Cris de Paris «. Le programme comprend également des oeuvres de Clément Janequin, Roland de Lassus Et des créations de Jannik Giger et Jean-Christophe Groffe.

Jean-Christophe Groffe fait un rapprochement justifié entre ces onomatopées et celles de La bataille de Clément Janequin, y compris avec le « Tout est frelore bigoth » (Dieu, tout est perdu) de Panurge affolé par une tempête en mer, au chapitre xviii. Qui a repris quoi de l’autre, d’un troisième modèle ou simplement d’expressions courantes ou rampantes de l’époque ?

En réalité cela n’apporte rien de plus ni n’en retire à la beauté travaillée de ce cédé, mais cette image des mots et sons décongelant, que l’on peut entendre circuler dans l'air et dont on peut prendre à brassée ceux encore gelés, correspond parfaitement. Il y a bien des sortes de beautés, sans lesquelles par ailleurs notre subjectivité serait bien, monotone et morose. Ce programme évoque quelque chose de la Materialgerechtigkeit des architectes et plasticiens, une « justice du matériau », qui vise à tirer du matériau lui-même ses beautés spécifiques, sans modèle ni imitation, en fait un travail sur la pureté. Il y a chez Thélème et les complices de cet enregistrement cette exigence de pureté, d'autonomie sonore, alliée à la truculence et à l’humour potache désopilant des bons vivants. Une mutation de la langue de Rabelais en somme.

Jean-Marc Warszawski pour www.musicologie.org